Cette Porsche 908 porte le numéro 64 car elle était inscrite sur la liste des suppléants. Confiée au vétéran Hans Herrmann et au benjamin Gérard Larousse, Herrmann signe son meilleur temps en première séance et se qualifie en 8ème position. Quant à Larrousse, qui a débuté sur Spyder 908 à la Targa, il découvre la longue queue, comme il le confie à L'Equipe : "Je n'aurais jamais cru qu'il y ait une telle différence pour une même voiture dotée de deux carrosseries différentes. La longue queue a un comportement très particulier. Dans les courbes rapides, l'arrière se place et donne l'impression que la voiture survire, mais ce n'est pas encore le cas. Le dérapage ne vient qu'après ce phénomène purement aérodynamique. J'avance pianissimo car l'impression de puissance est beaucoup plus forte que celle produite par l'Alpine 3 litres. C'est vraiment faire de la compétition que de courir en circuit avec de telles voitures".
Après un bon départ en 6ème position, Herrmann double la Lola de Bonnier dès le premier tour et entame un duel avec Schütz pour la 4ème place. Herrman finit par s'incliner, mais étant le dernier des ténors à ravitailler, il occupe la tête pendant un tour, avant son arrêt à 15h20. La numéro 64 occupe une prometteuse 3ème place lorsqu'elle s'arrête vers 19h35. Un roulement de roue avant est en cause et il faut changer tout le porte-moyeu. Hélas, la pièce n'est pas disponible et les mécaniciens doivent cannibaliser la voiture de Siffert, qui vient d'abandonner. Un temps précieux est perdu et Larrousse repart après 31' d'arrêt, en 12ème position. La 908 atteint la 8ème place vers la fin de la 14ème heure, puis la 4ème place deux heures plus tard. A trois heures de l'arrivée, après l'abandon des Porsche numéro 22 et 12, la numéro 64 pointe en seconde position à moins de 3' de la Ford de Ickx et Oliver qui a pris la tête.
Celle-ci tourne alors à un rythme moins élevé, car un échappement est cassé et le moteur commence à manquer d'eau. La Porsche remonte à raison de 5" au tour. Lorsque la GT40 ravitaille, l'équipe Gulf en profite pour changer les plaquettes à l'avant et s'occuper de l'échappement. L'arrêt dure près de 4' et permet à la Porsche de prendre la tête avec 47" d'avance, jusqu'à son propre arrêt. Celui-ci étant plus rapide, Larrousse repart dans le sillage de Jacky Ickx. Au volant d'une Ford revigorée, le Belge creuse d'abord l'écart jusqu'à 10", puis une fois échauffé, Gérard entame sa remontée. A midi, il a refait la moitié de son retard et au terme de son relais, il a rejoint la Ford.
A cet instant, la confiance règne dans le camp allemand, car on se dit que si Larrousse est revenu sur la Ford, Herrmann devrait pouvoir la distancer. La Porsche repart avant que la GT40 n'arrive, mais celle-ci s'impose dans la courbe Dunlop. Le suspense est à son comble, d'autant qu'il n'est plus question de s'arrêter, pas même pour remettre de l'essence. Au fil des tours, on se rend compte chez Porsche que la partie va être plus difficile que prévu. Ickx a porté son avance à 6", puis Herrmann revient dans le sillage de la Ford et à une heure de l'arrivée, la Porsche repasse en tête. Ickx réplique dès le tour suivant, entamant avec Herrmann un incroyable chassé-croisé, perturbé durant quelques tours par l'autre Ford GT40 de Mike Hailwood, qui occupe la 3ème place.
Les deux voitures tournent dans une fourchette de temps variant de 3'37" à 3'42" et échangent fréquemment leurs positions. A l'accélération, la légèreté de l'Allemande lui permet de rivaliser avec le couple de l'Américaine. En ligne droite, la Porsche possède l'avantage d'une aérodynamique plus fine. C'est surtout au freinage que Jacky Ickx fait la différence. Plusieurs fois, on voit la Ford déborder la Porsche au freinage de la chicane ; Jacky répète le sprint final !
Herrmann semble prendre l'avantage dans la dernière demi-heure, mais Ickx reprend la tête à trois tours de l'arrivée ! Si Herrmann n'a ni la jeunesse ni la classe d'Ickx, il sait qu'il dispute la course de sa vie et sa motivation ne peut être mise en doute. Elle est seulement perturbée par cette lumière qui s'est allumée sur le tableau de bord quelques minutes après le début de son relais : le témoin d'usure des plaquettes de freins.
Et les pannes de freins, Herrmann connaît, car c'est à cela qu'il doit son mémorable accident de 1959, à l'Avus. Nul doute que ce souvenir hante l'esprit du pilote de Stuttgart, chaque fois qu'il appuie sur la pédale du milieu. Jacky Ickx n'a pas ce soucis car ses plaquettes ont été changées avant le rush final. Sa Ford lui inspire une totale confiance. Herrmann cherche une solution pour gagner cette course sans avoir à affronter Ickx au freinage, mais il ne la trouve pas.
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Il y a aussi le souci de l'essence : tomber en panne si près du but serait le comble de l'humiliation. C'est pourtant bien dans le dernier tour que la course se joue. Ickx l'a entamé en tête, mais il ne veut pas mener, Herrmann non plus. Au début des Hunaudières, Jacky monte ses rapports jusqu'en cinquième puis lève le pied. Ruse ? Panne d'essence ? Herrmann hésite un instant, puis enfonce l'accélérateur. Ickx tombe une vitesse et prend le sillage de la Porsche. Profitant de l'aspiration, il la double avant le freinage de Mulsanne où Herrmann ne peut répliquer. La suite est un jeu d'enfant pour Jacky Ickx, qui aura fait la différence bien avant la ligne d'arrivée.
Après la course, le moteur sera passé au banc et une perte de 10 ch sera enregistrée. La pièce de transmission ayant cassé sur la numéro 22 se révélera aussi très usée sur la numéro 64. Quant aux plaquettes de freins, Porsche affirmera qu'elles étaient encore en bon état, contrairement à ce qu'indiquait le témoin d'usure.
Le Kit GMC 12
Le kit GMC reproduit une Porsche 907 de 1967. Pour le modifier en 908 de 1969, il faut ajouter l'aileron arrière (prélevé sur une Porsche 917 Scalextric), et surtout modifier le pavillon qui forme un arrondi vers l'avant. La décoration est fournie par Le Mans Decals. Le kit est prévu pour être monté sur un châssis moulé en résine spécifiquement pour cette voiture. Au final, le modèle est très réussi, et la finesse aérodynamique de la Porsche se retrouve bien dans cette reproduction.
Sur la piste, la raideur du châssis et le poids important de la carrosserie en résine, ne permettent pas d'obtenir des performances très élevées. Comme beaucoup de modèles en résine pour le slot racing, cette voiture trouvera plus sa place dans une vitrine que dans les courses de club.